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Créer un esprit collaboratif au sein d’une classe : l’émergence des « Serious Games »

7 janvier 2019
Nouvelles Classes

Il y a mille façons d’apprendre. C’est en partant de ce principe simple que l’apprentissage peut se faire ailleurs que derrière un bureau et en jouant ! Les « Serious Games » rapprochent ainsi deux termes qui semblent opposés au travers d’une recherche ludique. Des logiciels « ludo-éducatifs » qui offrent, au-delà de la portée pédagogique, une réelle expérience à l’élève. Alors comment les « Serious Games » peuvent-ils devenir un levier pédagogique pour les enseignants ? Comment l’organisation de la classe peut-elle renforcer cette expérience ? Explications.

« Serious Games », de quoi parle-t-on ?

Comprendre avant d’apprendre. Les « Serious Games » s’inscrivent dans cette logique de l’apprentissage par l’expérience. Selon le Centre de ressources et d’information sur les multimédias pour l’enseignement supérieur (CERIMES), « les Serious Games (ou jeux sérieux) sont des applications développées à partir des technologies avancées du jeu vidéo, faisant appel aux mêmes approches de design et savoir-faire que le jeu classique (3D temps réel, simulation d'objets, d'individus, d'environnements…) mais qui dépassent la seule dimension du divertissement. » Basés sur la théorie des jeux , ils engagent les participants à se projeter dans une situation afin de prendre des décisions, conscients que le résultat de leurs « gains » dépendra de celui des autres. On parle aussi de « théorie de la décision en interaction ». Damien Djaouti, auteur de l’article Serious Games pour l’éducation : utiliser, créer, faire créer ?, estime que les « Serious Games » sont nés dans les années 2 000. Et les vertus de cette nouvelle approche sont nombreuses à commencer par un gain de motivation des élèves dans le milieu éducatif ! Sur le principe du « test and learn », les erreurs ne sont pas stigmatisées mais servent au contraire à l’apprentissage. Chaque élève peut ainsi apprendre à son rythme, et recommencer une étape en fonction de ses difficultés si cela est nécessaire. Le principe du jeu encourage les interactions entre élèves et l’esprit collaboratif. Ils échangent, défendent leurs idées, prennent des « risques » pour solutionner les problèmes auxquels ils sont confrontés. Les « Serious Games » se distinguent ainsi des jeux vidéo classiques par leur objectif d’acquérir une connaissance ou une compétence, tout en conservant la notion de plaisir. Ils se fondent notamment sur la prédisposition humaine au jeu et plus particulièrement à un certain goût pour les jeux vidéo. L’agence française de l’opinion publique (IFOP) souligne dans sa dernière étude sur le sujet que le jeu vidéo s’impose comme « un loisir de masse intégré à la vie quotidienne des Français ». 68% de la population joueraient ainsi aux jeux vidéo. Autre donnée intéressante, le jeu vidéo incite à la convivialité : 62% des joueurs pratiquent en famille ou entre amis. Un terreau favorable aux « Serious Games ».

A chaque problème son jeu sérieux !

De nombreux « Serious Games » ont vu le jour avec des objectifs extrêmement divers : comprendre la géométrie, apprendre l’histoire, comprendre le fonctionnement d’une protéine, réussir à faire des divisions… la théorie devient pratique ! En 2014, le CANOPE Créteil a réalisé un B.A.B.A des « Serious Games », classifiés autour de cinq types de contenus :

  • « Faits » : apprentissage par le contexte dans lequel se déroule le jeu.
  • « Raisonnements » : résoudre des énigmes de logique et de mathématiques.
  • « Procédures » : apprentissage et exécution de règes prédéfinies (jeux de simulations).
  • « Communication » : expression écrite en s’appuyant sur un jeu.
  • « Systèmes » : comprendre le fonctionnement d’une entité et des interdépendances.

On retrouve ainsi des exemples de nouvelles expériences comme le jeu « Minecraft » qui permet d’apprendre aux élèves à coder par une approche collaborative. La pratique du jeu met en relation les connaissances acquises en cours de technologies et de mathématiques. Les « Serious Games » sont aussi l’occasion pour les participants de réfléchir à des dynamiques de sociétés comme celui de « l’évolution de la confiance » qui reproduit les comportements possibles lors d’échange entre deux individus en choisissant de coopérer ou de tricher. La conclusion ? La confiance permet de faire perdurer la relation, pour le reste, retrouvez l’expérience sur le site. Des « Serious Games » voient également le jour afin d’offrir une solution pour l’inclusion des enfants en difficulté scolaire dès le plus jeune âge. Magik Eduk en est un exemple afin de rendre l’apprentissage de la lecture plus facile et lutter ainsi contre l’illettrisme. Le concept : au travers d’un jeu d’aventure où l’élève devient un super-héros, il apprend à se concentrer sur la correspondance entre lettre et son sur une base graphico-phonique. Déjà tester dans une quarantaine de classes de l’académie de Poitiers, l’application sera testée dans plusieurs écoles d’ici la fin de l’année. Autre difficulté récurrente chez les élèves : l’apprentissage des mathématiques ! Déjà testé auprès de 50 000 collégiens et 1 200 professeurs, Navadra propose au travers de la conquête d’une île déserte aux Fidji et de tournois entre « gamers » de résoudre des équations et de réviser des notions théoriques. Déjà référencé par EduScol, une nouvelle version du jeu est attendue pour mi-janvier 2018. Des exemples qui ne sont qu’un échantillon du champ des possibles en termes de « Serious Games ». 

Une première expérience à grande échelle en France

Une expérimentation de jeux sérieux a été conduite dans l’académie d’Aix-Marseille de septembre 2010 à juin 2012 au sein de 34 établissements. Plus de 100 enseignants et élèves ont pris part à l’aventure du collège au lycée. En tout 8 jeux thématiques (vente, management, politique, environnement, etc.) étaient proposés au travers de différentes modalités pratiques : classe entière, groupes ou binômes. L’environnement aussi de la salle de classe, à la salle multimédia, au CDI. Et le résultat a été au rendez-vous ! Au terme de l’expérience de deux ans, 86% des enseignants ont estimé que la pratique d’un « Serious Game » avait apporté une plus-value à l’enseignement de leur discipline comme le soulignent plusieurs témoignages : « classe intéressée par le jeu au départ ; ils se sont approprié́ les notions. » ou encore « les élèves ont trouvé́ que le test complétait bien les notions vues en cours et observées en stage car cela leur a permis de simuler de façon plus concrète une situation proche de la réalité́ ». Un autre enseignant ajoute : « Le jeu intervient comme un moyen de relancer les élèves, de les remotiver pour apprendre. » Des limites ont cependant été identifiées par les professeurs tels qu’une approche superficielle de l’expérience par l’élève qui peut ne pas couvrir l’ensemble des questions évoquées dans le jeu, le risque de « zapping » ou la prédominance du jeu sur l’apprentissage.

Comment mettre en place un « Serious Game » en classe ?

Les « Serious Games » s’inscrivent dans une logique plus globale de l’enseignement avec comme objectif de mettre en pratique une connaissance théorique pour se l’approprier. Les « Serious Games » favorisent ainsi une certaine liberté de l’élève pour lever les possibles blocages sur un sujet donné. Cette attitude ouverte est induite par l’alternance entre un travail en autonomie sur le logiciel ainsi que le travail en ateliers avec les autres élèves de la classe. Ainsi, optez davantage pour une disposition en îlots de la classe afin d’encourager le travail en petits groupes. Une gestion de l’espace qui permettra notamment une intégration plus facile du matériel numérique au sein de la classe et encouragera les échanges. Car la richesse du « Serious Games » provient également des interactions entre élèves qui émettent des hypothèses et intègrent ensuite les « feed-backs » des autres participants ou de l’enseignant.  « L’effectif de la classe est assez important, cela me permet donc de mener quelques activités en comité plus restreint, pendant que les autres s’initient à l’autonomie. Ils suivent des consignes, ou jouent par eux-mêmes », témoigne Anthony, professeur des écoles qui utilise les « Serious Games » pour ses élèves de maternelle.

L’apprentissage par support numérique individuel permet également d’apporter une solution aux élèves en situation d’autisme dont le besoin d’isolement périodique nécessite des temps calmes afin d’appréhender les questions posées avec sérénité.  Si l’élève est en difficulté, il aura la possibilité de rejouer la séquence jusqu’à obtenir la solution sans pour autant ralentir les autres participants. Une approche  inclusive valorisée notamment par le jeu Magic Eduk.

Dans ce contexte, le rôle de l’enseignant est alors essentiel pour s’assurer en circulant entre les différents groupes, que les élèves réalisent correctement les différentes étapes du jeu. Il s’assure que la pratique du jeu se réalise en lien directe avec les notions du cours théorique abordées en amont de la séance. L’avant comme l’après sont donc des phases tout aussi essentielles au jeu afin de valider les acquis et restituer les connaissances.

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Auteur : Bertrand

Responsable Éducation et Numérique

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