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Le PODD : mieux communiquer avec les enfants à besoins spécifiques

18 mai 2022

L’école inclusive se doit d’accueillir dans la mesure du possible tous les enfants, quelles que soient leurs spécificités. Certains, par exemple, présentant un trouble du spectre autistique, un Syndrome d’Angelman ou un Syndrome de Rett, ont plus de difficultés à communiquer que d’autres. Des outils existent pour permettre à ces enfants à  «besoins de communication  complexes » ou BBC, de s’exprimer et entrer en relation avec leur entourage. Parmi ces outils, il y a le PODD. Ce drôle d’acronyme signifie « Pragmatic Organisation Dynamic Display », ou « Tableau dynamique à organisation pragmatique». Focus sur un outil de communication alternative particulièrement riche et puissant. 

Le PODD est un outil de communication alternative inventé par Gayle Porter : cette orthophoniste australienne travaille depuis 30 ans à Melbourne dans l’accompagnement des personnes à besoins spécifiques en termes de communication. 

Le PODD se présente comme un ensemble de classeurs, affichant des symboles utilisés par l’entourage proche de l’enfant pour communiquer avec lui. Ces symboles peuvent être des pictogrammes, des graphismes ou même des mots écrits. Leur intérêt est qu’ils offrent plusieurs strates lexicales. Le PODD fait en effet partie des outils proposant une communication « naturelle » particulièrement riche. L’association AFSA (Association française du Syndrome d’Angelman), souligne ainsi qu’il ne se limite pas à permettre l'expression d’une demande par la personne à besoins spécifiques. L’outil est bien plus puissant que cela, et permet « d'exprimer toute sorte de messages : dire comment on se sent, ce que l'on aime ou n'aime pas, poser des questions, exprimer ses émotions, etc. »  

Le PODD permet aussi de « lever des ambiguïtés » qui pourraient subsister si l’outil n’était qu’un dictionnaire de symboles, poursuit l’association : « Lorsque l'enfant nous donne une carte "manège", comment savoir s’il nous dit vraiment "je veux aller au manège / J'adore les manèges / J'ai vu un manège / Hier, je suis allé faire du manège..." ? » Le PODD permet de résoudre ce problème. Il fait appel aux différentes fonctions du langage, avec l’expression des émotions et des sentiments, d’un accord ou d’un désaccord, voire d’un refus. Il permet aussi de « décrire », un objet, une situation. Il s’agit donc d’un langage complet, avec beaucoup de mots de vocabulaires représentés par des pictogrammes, mais dont l'organisation spécifique permet d'élaborer des phrases simples ou plus complexes. C’est son avantage par rapport à d’autres méthodes, estime l’AFSA.   

L’association souligne aussi d’autres caractéristiques du PODD qui en font un outil particulièrement adapté aux enfants présentant le Syndrome d’Angelman, à commencer par son côté visuel, dans la mesure où ces enfants possèdent souvent une très bonne mémoire visuelle. Et surtout, c’est un outil qu’on utilise en interaction avec les autres. L’interlocuteur (ou « partenaire de communication ») doit lui aussi utiliser le PODD et se servir des pictogrammes. Il doit finalement lui-même apprendre ce langage, et ainsi entrer véritablement en communication avec l’enfant, ce qui est très bénéfique.

 

Le PODD : un outil de communication aussi pour l’entourage  

Dans l’idéal, pour que le PODD soit efficace, l’ensemble de l’entourage de l’enfant devrait l’utiliser pour communiquer (on parle de pratique « immersive »). Ce n’est pas si simple. Les parents et l’entourage proche seront sûrement heureux de découvrir cette méthode et de la pratiquer, mais cela peut demander un effort conséquent de la part des enseignants ou des camarades de classe.  

Utiliser correctement le PODD nécessite souvent une formation pour bien comprendre le fonctionnement de la méthode. Il s’agit en général de formations courtes. Elles sont destinées aux parents, mais aussi aux enseignants, aux professionnels et étudiants travaillant auprès de personnes à besoins spécifiques (orthophonistes, ergothérapeutes, éducateurs spécialisés...).  

Pour les puristes, la pratique de la méthode PODD implique aussi l’acquisition de CDs et d’un logiciel pour créer les symboles qui seront imprimés sur plusieurs classeurs thématiques (repas, loisirs etc), que l’on devra ensuite plastifier.  

On peut réaliser soi-même des classeurs d’inspiration PODD, mais cela prend de toute façon pas mal de temps : il faut en effet personnaliser ces classeurs en fonction de l’enfant et de l’entourage qui les utilisera.  

 

Utiliser le PODD à l’école 

Utiliser le PODD à l’école avec un enfant à besoins en communication complexes demande donc un certain investissement, notamment en termes de temps. Dans le contexte d’une école inclusive, idéalement, l’ensemble des camarades de l’enfant devrait lui aussi se former au PODD. Quoi qu’il en soit, cela peut représenter une activité éducative utile et enrichissante pour tout le monde : la communication via le PODD est une forme de langage à part entière. On l’apprend un peu comme une langue étrangère. Elle repose sur une logique propre, avec des cheminements précis qui suivent les pages des classeurs dans un ordre bien établi. 

En 2015, un livret a été publié en français à destination des enseignants et éducateurs accueillant des élèves porteurs du Syndrome d’Angelman, en classe ordinaire ou en classe spécialisée. Ce livret, intitulé « Le syndrome d’Angelman pour les enseignants et les éducateurs », est accessible gratuitement depuis le blog « A plusieurs voix ». Il s’agit de la traduction d’un ouvrage d’Erin Sheldon, spécialiste américaine des questions de l’inclusion scolaire, et elle-même mère d’une enfant porteuse du Syndrome d’Angelman. Ce livret aborde notamment la méthode PODD ainsi que d’autres méthodes de communication alternative. Il souligne notamment que « Le système PODD repose sur le partenaire de communication, qui agit en ‘’partenaire intelligent’’, c’est-à-dire qu'il soutient l’élève vers une plus grande compréhension et une meilleure expression du langage. En général, on démarre avec un classeur PODD en version papier, mais on peut également le proposer sur une tablette tactile comme synthèse vocale ».  
En effet, comme le confirme l’AFSA, il existe plusieurs formats de PODD : des classeurs avec ouverture sur une page, sur deux pages, avec deux pages accompagnées d’un rabat... Il y a aussi des PODD au format digital.  

Quel que soit le support, l’outil lui-même propose une progression en termes de complexité, au fur et à mesure des progrès de l’enfant. Le choix du format dépend aussi de possibles difficultés motrices ou sensorielles, parfois associées aux troubles de la communication dans le Syndrome Angelman.  

>> Lire aussi : De petits aménagements pour mieux accueillir en classe un enfant autiste.

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