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L’ergothérapie : un levier d’intégration pour les élèves souffrant de troubles TDC à l’école

19 avril 2021

Les élèves souffrant d’un trouble développemental de la coordination, ou dyspraxie, ont des difficultés à accomplir des gestes automatisés par d’autres, comme découper, organiser son cartable, coller ou écrire. L’ergothérapie est riche d’enseignements pour améliorer leur quotidien en classe comme dans toutes leurs activités du quotidien. 

Sans connaissance sur le sujet, on peut penser des enfants souffrant d’un trouble développemental de la coordination (TDC) qu’ils sont maladroits, brouillons, lents, voire peu investis. « Pourtant, ils souffrent de réelles difficultés dans la coordination du geste notamment. C’est un combat quotidien entre ce que l’enfant veut faire, et ce que son corps ou ses mains produisent à chaque fois », explique Marine Tosser, ergothérapeute. 

Diagnostiquer tôt 

Afin de permettre aux enfants souffrant de dyspraxie d’être le plus autonomes possibles et intégrés en milieu scolaire et extra-scolaire, l’âge du diagnostic est clé. « Le repérage par les enseignants dans les classes ne devrait pas attendre le CE2 par exemple », souligne Marine Tosser.

Bien sûr le diagnostic final appartiendra à un neuropédiatre. Mais un TDC peut être repéré en s’appuyant sur quatre critères selon le manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux (DSM), ouvrage de référence publié par l'Association américaine de psychiatrie décrivant et classifiant les troubles mentaux :

  1. L’acquisition et l’exécution de compétences motrices sont nettement inférieures au niveau escompté pour l’âge de l’enfant. 
  2. Ses déficiences motrices interfèrent de façon significative et persistantes avec les activités de la vie quotidienne et ont un impact sur ses performances scolaires.
  3. Le début des symptômes date de la période développementale précoce.
  4. Les déficiences des compétences motrices ne sont pas expliquées par un handicap intellectuel ou une déficience visuelle.

Il importe donc de bien observer les petits dès la maternelle dans l’accomplissement d’activités graphiques ou de jeux par exemple. C’est le cas d’Adam, diagnostiqué à six ans de troubles TDC : « En moyenne section, la maîtresse a constaté qu’Adam n’avait pas confiance dès qu’il avait un crayon dans la main et nous en a fait part. Mais elle a rapidement trouvé un fonctionnement avec lui. Nous sommes donc restés vigilants. Puis en grande section, quand le graphisme prend vraiment toute sa place, la situation s’est dégradée », raconte Madame Mornas. Des premiers tests réalisés par la responsable de la médecine scolaire ont montré qu’il y avait un trouble. « Elle nous a donc recommandé de faire tester la vue et l’ouïe de notre fils, de consulter un neuropédiatre ainsi qu’un ergothérapeute », ajoute-t-elle. 

Rééduquer, réadapter, compenser

Pour l’ergothérapeute, tout commence par un bilan en cinq étapes. Une rencontre avec la famille et l’enfant au cabinet d’abord. Puis deux visites de l’enfant seul pour passer différents tests, et dans le cadre d’une suspicion de TDC, constater le décalage dans les coordinations motrices. « Ensuite, j’appelle l’école et interroge l’enseignant de l’enfant, poursuit l’ergothérapeute. Comment se passent les apprentissages ? Les échanges au sein de la classe ? Pendant la récréation ? A la cantine ? L’élève peut-il mettre et enlever son manteau ? … » Enfin, l’ergothérapeute revoit la famille pour lui expliquer ce qu’il/elle a compris de l’enfant et de ses difficultés et, généralement, propose une prise en charge adaptée. 

Dans cette discipline, les professionnels centrent leur accompagnement autour de trois axes. La rééducation, pour travailler la motricité fine chez l’enfant (tracer une ligne, tenir un stylo…). La réadaptation pour agir sur la relation entre l’enfant et un environnement donné, comme l’école. S’accorder avec l’enseignant pour se concentrer sur la découpe de formes simples avant d’attaquer un peu plus tard que prévu les formes complexes, par exemple. Enfin, la compensation, consistant à trouver un matériel adapté pour faciliter la réalisation d’un geste : des ciseaux s’ouvrant plus facilement par exemple. 

« Et il me semble très opportun d’organiser une équipe éducative réunissant les professionnels de santé en libéral, le responsable de l’établissement scolaire, l’enseignant, et les parents, encourage Marine Tosser. Cela permet de cibler collectivement certaines activités prioritaires pour l’enfant ». 

Méthode CO-OP et autres astuces

Pour Adam, suivi par Marine Tosser entre ses 7 et ses 9 ans, les résultats ont été au rendez-vous. « Avec la dyspraxie, on se concentre souvent sur l’apprentissage de l’ordinateur mais il faut que l’enfant puisse réaliser plusieurs activités, et soit en mesure de comprendre des consignes mathématiques par exemple. Marine Tosser a justement travaillé sur d’autres axes. A tel point qu’à l’école, les maîtresses d’Adam ne voient plus de différences de comportement avec les autres enfants », témoigne Madame Mornas. 

Pour améliorer sa motricité fine, outre les exercices, Marine Tosser a notamment préconisé l’usage d’un gant lesté, afin qu’Adam place mieux sa main et soulage son poignet dans les phases d’écriture. Elle a également recommandé l’utilisation d’un pupitre incliné. 

« Selon les troubles de coordination qui affectent l’enfant et leur degré, plusieurs moyens sont à notre disposition », assure Marine Tosser : découper des feuilles cartonnées lesquelles permettent de réduire le mouvement du papier classique et aident l’élève à se stabiliser pour mener à bien son activité ; ou, pour les mathématiques, laisser des espaces importants sur les feuilles de géométrie afin que l’élève ait la place de se corriger. 

De plus, l’approche CO-OP a fait ses preuves. « On conduit l’enfant à réfléchir à la réalisation d’un mouvement ou d’une tâche avant de passer à l’acte : quel est le but de ton mouvement ? Quel va être ton plan pour l’accomplir ? Une fois fait, est-ce que le plan a fonctionné ? On résume cette logique par : But, plan, fais, vérifie », détaille Marine Tosser. Une méthode qui a permis à Adam d’apprendre à ranger son casier et à préparer son cartable seul.  

L’approche de l’ergothérapie mériterait donc d’être davantage connue, notamment en milieu scolaire, pour améliorer le bien-être et l’intégration d’enfants souffrant de troubles de type TDC. 

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