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Classe inversée : « Accompagner des élèves actifs dans la découverte des savoirs »

30 novembre 2022

Inverser la classe pour impulser une dynamique d’apprentissage collaborative, retrouver du sens et du temps pour accompagner pleinement ses élèves… C’est le parti pris pédagogique choisi depuis 10 ans déjà par Mickaël Bertrand, professeur d’histoire et de géographie en lycée. Voici son retour d’expérience concret et sans détour pour nous aider à mieux se saisir de cette approche pédagogique. 

Pourriez-vous nous expliquer la notion de classe inversée ? Que change-t-elle pour l’enseignant ? 

Mickaël Bertrand : La pédagogie des classes inversées s’adapte à toutes les disciplines et à tous les contextes scolaires. Elle consiste à repenser la posture du professeur qui n’est plus seulement celui qui détient et transmet le savoir de façon solennelle, mais aussi celui qui accompagne des élèves actifs dans la découverte des savoirs. 

Concrètement, l’enjeu est de proposer un travail préparatoire aux élèves en amont du cours. La notion d’autonomie  est donc au centre de la pédagogie des classes inversées : que doit-on proposer en classe et parfois en dehors de la classe ? Bien-sûr, l’élève ne peut pas tout découvrir par lui-même et doit être guidé ! Le professeur devient un « ingénieur pédagogique ». Le cœur de son métier consiste à imaginer des parcours pédagogiques mêlant différentes situations d’apprentissage qui lui permettent d’accompagner l’élève dans sa progression. 

 

De façon très concrète, comment se pense un cours en classe inversée ? Comment se déroule-t-il ? 

M. B. : L’idée est de prendre appui sur ce que les élèves savent déjà afin d’identifier ce qu’ils sont en mesure d’apprendre en autonomie. En amont du cours, ils réalisent ainsi des « activités préparatoires ». Il peut s’agir de regarder une vidéo, d’écouter un podcast ou tout simplement de lire un polycopié de cours. Ce travail est toujours accompagné d’une activité qui attire leur attention sur les informations essentielles à retenir. 

Le temps de classe est essentiellement centré sur le travail en équipe et le développement des compétences qu’un élève ne peut pas acquérir seul. Le cours est rythmé d’activités à réaliser individuellement et en collectif. Afin de réduire les inégalités socio-scolaires, il est essentiel que les élèves ne se confrontent pas seuls à la difficulté. La classe est le lieu idéal pour augmenter le niveau de complexité et lever les points de blocage, en présence de l’enseignant. 

 

Quels en sont les avantages du point de vue de l’élève ? Et pour l’enseignant ? 

M. B. : Rallumer l’étincelle, l’envie et le plaisir chez les professeurs autant que leurs élèves, le plus grand bénéfice est là. Plusieurs témoignages ont montré que cette approche a permis à certains collègues de redonner du sens à l’exercice de leur métier. Quant aux élèves, je crois qu’ils apprécient le principe même de cette pédagogie active. Ils n’entrent pas en classe pour écouter passivement leur professeur pendant deux heures. Ils viennent travailler et se sentent accompagnés. Lorsqu’ils évoquent les tâches à réaliser hors classe, ils ne parlent pas de « devoirs à la maison » mais bien d’« activités préparatoires ». Ils ont tout à fait saisi l’intérêt de ce petit socle qu’ils travaillent en autonomie. 

Résultat ? Ils s’investissent et comprennent mieux. Les problèmes de discipline s’estompent. Bien que la classe inversée n’en soit pas la seule raison, elle contribue énormément à l’équilibre du groupe en termes de comportement. Le temps de classe devient beaucoup plus utile et cela s’observe très clairement au niveau de leur progression scolaire. 

 

Que préconisez-vous aux enseignants souhaitant expérimenter la classe inversée ? 

M. B. : Le point de départ est de reprendre son cours en se demandant ce qui est susceptible d’être donné à faire aux élèves en autonomie. Cette première étape enclenche toute une série de questions. Comment être plus efficace et amener davantage de différenciation ? Où ma présence est-elle utile ? Cela implique de repenser ses plans de travail avec des phases de tests et de tâtonnements… Et beaucoup d’organisation ! Les activités préparatoires sont précieuses, sous réserve que les élèves aient le temps de les réaliser. Ces travaux sont à annoncer le plus tôt possible avant le cours et ne doivent pas mobiliser plus de 15 minutes par semaine. La flexibilité de l’espace joue aussi un rôle important : les élèves doivent se sentir libres de bouger et d’échanger ! Basculer en classe inversée demande du temps et de la réflexion, mieux vaut se fixer un objectif par an et ne pas s’éparpiller. 

 

Quels sont les enjeux à relever pour pérenniser et diffuser plus largement la classe inversée ? 

M. B. : Au cours des dix dernières années, un travail titanesque a été accompli par les collectifs d’enseignants pour que cette pédagogie s’infuse au sein de toutes les académies et sur tous les territoires. Cela porte ses fruits ! Les classes inversées sont de plus en plus intégrées dans les pratiques pédagogiques. 

L’enjeu aujourd’hui serait de parvenir à une meilleure cohérence et plus d’efficience. De nouveaux outils numériques sont apparus et permettent de mutualiser bien plus facilement les ressources créées, surtout au sein d’une même structure. C’est à mon sens le défi à relever pour l’éducation nationale : s’assurer qu’une certaine synergie s’opère au sein des équipes pédagogiques en interne afin de pérenniser et d’ancrer la pédagogie des classes inversées à l’échelle des établissements. 

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